(see
English text below)
Les écrans à mains ont fait
l'objet de nombreux et importants travaux récemment, en particulier
grâce à Georgina Letourmy-Bordier et Daniel Crépin dans une série
d'articles de la revue du Vieux
Papier1, qui montrent notamment des pièces de
théâtre, des événements d'actualité, ou qui servent à l'instruction des
jeunes gens.
Il faut aussi citer, relatés notamment dans la même
publication, les travaux de Philippe Cornuaille sur les écrans ronds du
XVIIe siècle, dont il ne reste semble-t-il que les estampes qui les
ornaient2.
Ces derniers écrans (voir ici un exemple3) comportaient sans doute
souvent un axe permettant de faire tourner la "feuille" de l'écran
(c'est à dire l'écran proprement dit).
On retrouvera cette mobilité sur
certains écrans du XIXe siècle, circulaires comme un calendrier
perpétuel royaliste réalisé pour saluer le retour des Bourbon
(collection CPHB), ou "à guichet", comme le bel exemple montré sur le site Internet de
Laetitia Georges (Fan d'Eventails).
On connait aussi les
"écrans-panoramas" (voir
image ci-dessous) où, inspirés
des panoramas de Carmontelle, où l'on voit défiler des paysages (le
plus souvent) ou des personnages grâce à une bande de papier se
déroulant derrière une sorte de scène de théâtre entre deux cylindres
apposés au revers de l'objet et actionnés par des molettes crantées en
os.
Il existe aussi d'autres
modèles divers jouant sur des effets de transparence, soit pour la
totalité de la feuille, réalisée sur une sorte de papier calque, soit
pour une partie de celle-ci, permettant de faire apparaître des images
(parfois séditieuses) cachées en filigrane : procédé que l'on trouve
aussi sur des éventails pliés.
Mais nous avons récemment
appris l'existence d'autres écrans "à transformation", où le changement
n'est pas mécanique ou optique... mais chimique !
Le Nouveau dictionnaire d'histoire naturelle,
appliquée aux arts, principalement à l'agriculture et à l'économie
rurale et domestique, paru chez Deterville en 1803 indique en
effet, dans son volume 5, p 546
D'autres publications relatent cet usage divertissant de l'encre sympathique. Ainsi nous lisons dans les Amusemens et Récréations de Société..., par M. Pelletier, Professeur de Physique amusante, Corbet, Paris, 1837 (2ème édition) , p. 66 :
"...vous aurez un tableau qui,
à la température ordinaire de l'air, représentera une campagne privée
de sa verdure ; mais faites le chauffer suffisamment, et point trop,
vous le verrez se couvrir de plantes, de feuilles, en sorte qu'il
représentera alors le printemps.
On a fait et l'on fait encore quelquefois, je crois, à Paris, des
écrans peints de cette manière. Ceux à qui on les donne, et qui
ignorent l'artifice, sont bien étonnés de voir, peu après qu'ils s'en
sont servis au coin du feu, le tableau qu'ils présentent absolument
changé".
Précisons que -contrairement à ce que l'on observe pour d'autres "encres sympathiques", ce changement est réversible.
Notre question est simple : chers lecteurs,
avez-vous jamais rencontré de tels écrans (voire de tels éventails) ?
Si oui, nous serions bien
curieux de savoir si après deux cents ans, ce merveilleux changement de
saisons se produit toujours !
Merci donc de nous écrire
(voir lien pour courrier en page d'accueil)
et de nous transmettre des photographies : nous partagerons avec joie
informations et images.
Une réponse :
Si plusieurs personnes ont fait part de leur intérêt pour notre
question, personne n'a -semble-t-il- vu d'écrans de cette nature.
Plusieurs se demandent d'ailleurs si, deux cents ans après, le
phénomène pourrait encore se produire. Marc Tordeux, Secrétaire Général
du Cercle de l'Eventail, et néanmoins scientifique de formation et de
profession, nous donne une explication scientifique de cette
transformation, que nous recopions ci-dessous. Nous l'en remercions, ne
doutant pas que certains lecteurs pourrons la comprendre,! Avouons que ce n'est pas notre cas, nos dernières leçons de chimie datant de près d'un demi-siècle.
(http://en.wikipedia.org/wiki/Cobalt%28II%29_nitrate) :
It
is derived from reacting metallic cobalt or one of its oxides,
hydroxides, or carbonate with nitric acid. It is commonly used in dyes
and inks.
CoCO3 + 2 HNO3 + 5 H2O → Co(NO3)2(H2O)6 + CO2
Above 55 °C, it dehydrates to the trihydrate and at higher temperatures to the monohydrate.
Voila
toute la magie : deshydratation réhydratation à 55 °C Vitesse
d'hydratation par la vapeur d'eau (contenue dans l'air).

Coll. CPHB
Magic screens
Hand screens
have been the subject of important work recently, particularly thanks
to Georgina Letourmy-Bordier and Daniel Crépin in a series of
articles of the the Vieux
Papier
journal1.
Those Eighteenth century screens show particular theater scenes,
topical events , or even serve for the instruction of the young boys
and girls.
It should also be mentioned, notably recounted in the same
publication, Philippe Cornuaille's research about Seventeenth
century circular screens, of which only the prints which adorned
them2.
These screens
(see an example3 here) had
probably often an axis for rotating the "leaf" of the screen (i.e. the
actual screen).
We find another kind of mobility feature in some
Nineteenth century screens, like a royalist circular perpetual calendar
made to greet the Bourbon come-back. (CPHB collection), or with
windows as the nice example shown on Laetitia Georges'website
(Fan d'Eventails).
One knows also
the "panorama-screens" (illustrated
above) inspired from
Carmontelle's panoramas, where we see a parade of landscapes (mostly)
or characters, a paper strip taking place behind a sort of theatre
stage, rolling between two cylinders affixed on the object reverse and
operated by bone toothed wheels.
There are also
other various models playing on transparency effects, either for the
entire sheet, made of some kind of tracing paper, or for part of it, to
show images (sometimes subversive) hidden filigree : process which is
also to be found on folding fans.
But we recently
read about other "transformation" screens, where the change is not
mechanical or optical... but chemical!
The Nouveau
dictionnaire d'histoire naturelle, appliquée aux arts, principalement à
l'agriculture et à l'économie rurale et domestique, published by
Deterville in 1803 indicates, in volume 5, page 546
See French text
above. : the author evokes "magic pictures" where, using a cobalt
dilution, invisible parts of the pictures become green when warmed.
"An ingenious artist has
taken advantage in a very pleasant way of this singular property; he
drew on screens, with their usual colors, winter landscapes where the
earth and the trees were stripped
of their greenery. He spent a cobalt dissolution on the grass,
and drew the tree foliage with the same dissolution. People who then
held the screens before the fire saw with surprise
the Winter scenery becoming in their hands an image of Spring".
Note that -at the contrary of what is observed for number of other "invisible inks"-, this change is reversible.
Our question is simple: dear readers, have you
ever met such screens (or such fans)?
If so, we would
like to know if after two hundred years, this wonderful change of
seasons still happens!
So thank you for
writing (see our email link on our home page)
and send us photographs : we will with pleasure share information and
images.
Please
see at the end of the French text above a scientifical explanation
given -in English- by Marc Tordeux, scientist and nevertheless Secrétaire Général du Cercle de l'Eventail.
1) LETOURMY (G.) & CRÉPIN (D.), - «
L’écran à main à Paris au XVIIIe siècle, son iconographie et ses
artisans » Le Vieux Papier, fascicules 403 (p. 386-397), 404 (p.
445-457), 405 (p. 494-504), 406 (p. 553-567), 407 (p. 25-40), 408 (p.
57-72), 409 (p. 107-120), 410 (p. 162-174), 411 (p. 209-220), et 412
(p. 241-250) ; Paris, 2011-2014.
2) CORNUAILLE
(P.), - « L’écran rond de feu à main à Paris du XVIIe siècle,
son iconographie et ses artisans », Le Vieux Papier, fascicule
416 (p. 443-453) (2015, à suivre).
3) François Chauveau.
Projet d’écran avec des scènes illustrant l’histoire de Renaud et
Armide sanguine, diam. 29,2 cm, BNF, Estampes, Rés. B 6 e boîte in-fol.
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